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VITICULTURE
29.01.2016

DROIT DE REPONSE

02.02.2016 -

Viticulture - Quel avenir pour la viticulture conventionnelle?

Suite à la publication de l'article « Pourquoi ils ont abandonné la certification bio » paru dans RÉUSSIR VIGNE, n° 225 janvier 2016, pp 20 et 21 la réponse de Dominique, viticulteur bio et élu Confédération paysanne à la Chambre d'agriculture de Gironde répond.

Réponse à l'article « Pourquoi ils ont abandonné la certification bio »
paru dans RÉUSSIR VIGNE, n° 225 janvier 2016, pp 20 et 21[1]

 

Il est difficile de rester sans réagir devant cet article pernicieux consacré à l'abandon de la « certification bio ». Le titre d'abord : « pourquoi ils ont abandonné la certification bio ». « Certification bio » est bien écrit en gros caractères gras pour laisser penser qu'on reste bio (voire plus bio que les bios ) , même si on déroge au cahier des charges !

Bien sûr, on nous ressert le coup du cuivre nocif pour les sols. Ceci est exact surtout si, comme nombre de viticulteurs conventionnels coincés par l'explosion des résistances aux produits phyto conventionnels, on se permet d'utiliser du cuivre sans la moindre limitation, ni contrôle. Cette affirmation repose sur du vécu : des traitements dits « d'aoûtement » ( souvent aux doses d'homologation ) entraînent des consommations parfois équivalentes à celles de bios sur l'ensemble de la saison.

La méthode proposée dans l'article est basée sur « l'équilibre entre molécules naturelles et molécules de synthèse ». Pourquoi ne pas dire entre molécules naturelles et molécules CMR* (Cancérigènes, Mutagènes Reprotoxiques )? Ca serait moins sexy, peut-être ?

La dose de 500g/ha de cuivre avancée par M. Vincenti n'est pas très loin de ce qu'on pourrait utiliser en pratiquant une bio pointue dans un climat comme celui du Vaucluse. Pour ma part, certifié Bourgeon suisse à Bordeaux, j'utilise entre 2 et 4 kg/ha de cuivre, dans un climat océanique.

L'affirmation selon laquelle les bios ont été plus touchés par le black rot en 2015 que les conventionnels, n'est en aucune façon généralisable. A Bordeaux, les braves gens qui ont suivi les préconisations des conseillers "Ecopipeau" de la Chambre d'agriculture ont subi des pertes considérables, ce qui n'est pas le cas des bios qui, le plus souvent, ont traité précocement. Et c'est la précocité du traitement qui a joué essentiellement.

Au passage, cet article sème un trouble infondé : M.Benoît Braujou, vigneron dans l'Herault, quitte la certification bio. Il dit ne plus utiliser « que des extraits de citrus et du petit-lait de chèvre ». Fort bien, mais on se demande bien ce qui l'a empêché de rester certifié bio avec de telles pratiques ? Le cuivre n'est pas obligatoire en bio que je sache. Alors, à quoi rime donc cet épisode inconsistant sinon à déconsidérer gratuitement la certification bio ?

Il est dommage que cet article en reste au vieux fonds de commerce anti-bio au lieu de poser des questions essentielles:

- Quel avenir pour la viticulture conventionnelle quand les notes phytos officielles de l'IFV (Institut français de la vigne et du vin ) de fin de saison montrent depuis des années que la montée des résistances rend d'ores et déjà de nombreux produits phytos ( souvent très dangereux) totalement inutiles ?  Peut-on continuer à mettre sur le marché des produits homologués CMR* alors même qu'ils ne rendent même pas les services attendus ?

- Que fait-on de la santé des viticulteurs et des riverains ?

L'IFV écrit, sans rire, par exemple dans son bilan phyto 2015, sur la famille des fongicides CAA: « il sera nécessaire de s'assurer, par des essais de terrain, que les substances actives concernées participent encore à l'efficacité des préparations qui les contiennent ». Et les exemples du même tonneau ne manquent pas dans ce bilan 2015!  On croit rêver ! La proposition de M. Despey, président du Conseil spécialisé vin de FranceAgriMer et secrétaire général de la FNSEA*, d'une reconnaissance accélérée des cépages résistants européens, sans expérimentation, semble releverd'une véritable peur panique devant les conséquences sanitaires des produits CMR* ( avec son cortège de poursuites judiciaires à venir et l'image désastreuse pour le vin qui va avec) et devant l 'échec total d'Ecophyto. Qui sera responsable des conséquences prévisibles de cette fuite en avant opérée en plein brouillard ?

- Pourquoi la filière n'a-t-elle pas anticipé depuis longtemps le virage environnemental de la société ? Pourquoi a-t-elle cru qu'il suffirait  juste de communiquer sur des points de détail bien verdis pour amuser le public et les journalistes ?

- Pourquoi le Négoce ne s'est-il pas servi de la montée de la bio pour revaloriser les vins au lieu de continuer à acheter les vins bio au prix low cost du conventionnel ? Quelle est la stratégie de long terme pour valoriser les spécificités des vins français dans un marché mondialisé où nous ne pouvons pas nous positionner simplement sur du bas prix ?

- Pourquoi cette omerta autour de la dégénérescence des plants ? Pourquoi dans ces conditions avoir imposé et financé des programmes massifs de replantation ?

- Pourquoi n'y a-t-il pas eu une véritable lutte prophylactique nationale ( vecteur + inoculum) contre la flavescence dorée ?

Il vaudrait mieux se poser les bonnes questions plutôt que multiplier sans fin les grands messes de la technostructure viticole où les officiels viennent se congratuler les uns les autres.

 

Dominique TECHER, vigneron bio à Bordeaux
Elu Confédération Paysanne à la Chambre d'agriculture Gironde



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